VIE LOCALE : "L'Entre 2 Guerres" 1919 - 1939
LAPEYROUSE sortait traumatisée
après l'effroyable holocauste.
Cependant, il fallait
reprendre goût à la vie : ne venait-on pas de vivre la "der des
der". Sans atteindre les chiffres élevés d'avant-guerre (30 en
1914) les naissances augmentèrent, 20 naissances en 1920 (joie des retrouvailles)
puis un reflux (15 en 1921 et 10 en 1922) puis une remontée 17 en 1923,
21 en 1924 (le record de ces 20 années), 19 en 1925, 14 en 1926, 20
en 1927 puis 15 en 1928 avec une chute au moment des classes creuses
(6 naissances seulement en 1934 et 9 en 1938). Mais sur l'ensemble des
ces 20 années, le solde démographique resta largement déficitaire (-114).
Quoique en forte diminution, la mortalité infantile frappait toujours
et surtout la tuberculose ; cette terrible maladie aujourd'hui jugulée
exerçait de terribles ravages et décimait des familles...
A part 1923 qui enregistra
un solde positif de + 2, 1927 + 1 et 1932 + 1, les 17 autres années
sont déficitaires ( - 16 en 1922) Voici le tableau comparatif
Naissances
Décès Différence
Naissances Décès
Différence
1920 20
22 - 2
1930 11 16 - 5
1921 15
19 - 4
1931 12 25 - 13
1922 10
26 - 16
1932 15 14 + 1
1923 17
15 + 2
1933 15 20 - 5
1924 21
22 - 1
1934 6 17 - 11
1925 19
20 - 1
1935 13 25 - 12
1926 14
23 - 9
1936 15 18 - 3
1927 20
19 +1
1937 16 20 - 4
1928 15
25 - 10
1938 9 24 - 15
1929 15
17 - 2
1939 17 22 -5
Soit au total
: 295 naissances et 409 décès différence :- 114
Aussi le chiffre de
population baissa constamment aux divers recensements de plus de 1 300
au début de 1921 on passa à 1 283 en mai 1926 et 1 218 en 1936.
La période la plus heureuse
fut sans doute de 1924 à 1930 avant la crise économique mondiale de
1930 à 1935.
De l'Armistice à 1924,
la réadaptation, la réorganisation furent assez pénibles : la main-d'oeuvre
manquait (trop de manquants, trop d'amputés, la plupart presque inaptes
au travail). L'échec de la grande grève de 1920 au P.O. se solda par
plusieurs renvois.
La première pensée
du Conseil Municipal fut pour perpétuer le souvenir. Dès le 27 juillet
1919, le Conseil en session extraordinaire décide l'érection d'un monument
aux morts, demande l'autorisation de prendre 10 m2 dans la Cour des
Garçons pour ce faire ; ce monument serait un exemple permanent pour
les élèves (devis 4 255 F). Une souscription publique donna 3 076 F
(Mr FOURNIER 70 F), le reste fourni par la commune.
Le 6 juin 1920, l'érection
fut confiée à l'entreprise TOURNEAUX (3 146 F) avec un supplément de
164 F pour la palme, 1 155 F pour les chaînes, 20 F terrassement, 225
F pour la fouille, 150 F pour la colonne. Le conseil décide la construction
d'une bordure de granit (21x8x21) et d'une grille de 1 m de haut (coût
1 050 F : entreprise CHASSAGNE de COMMENTRY) session du 6 novembre
1921.
Le 19 octobre 1919,
le Conseil attribue la somme de 200 F pour la fête des Poilus du 16
novembre 1919.
Élections du 30 novembre
1919 : 16 conseillers
304 voix : DUJON
Maire à Manifex 270 voix
:
BUVAT Victor La Loge
283 voix :
THUIZAT Gilbert Cerisiers 269 voix :
TOURNEAUX Alexis au Bourg
283 voix: PHILIPPON
Alexis Le Mont 249 voix: GRAND Louis aux Aiguillons
276 voix: ROBIN Alphonse
Montmirail 244 voix: BRUN Baptiste La Maison Neuve
274 voix: DURANTHON
Gilbert Le Breux 241 voix: ARDOIN Alexandre Le Vernet
273 voix: MARTIN Alphonse
Le Cluzeau 235 voix: TOIZAT Jean à Peuchaud
272 voix: LANDRIEVE
Louis La Corre 231 voix: ROBERT Alexandre à La
Faye
271 voix: FAYOLLE
Léon au Créchol 214 voix: LEPEIX Isidore au Créchol
Le 7 décembre,
Monsieur Alphonse MARTIN est élu Maire par 9 voix sur 16 votants (7
voix se portent sur Monsieur DUJON).
Monsieur Alexis TOURNEAUX
est élu adjoint par 16 voix sur 16.
Le nouveau conseil fixe
le prix du pain au même prix qu'à MONTAIGUT, limite à 50 I la part du
contingent de tabac du débit de La Gare pour les fumeurs locaux, le
reste devant aller aux voyageurs. Il est alloué 600 F à Monsieur CATEL
pour le recensement.
Le 21 août 1921, il
décide pour la fête patronale de payer 1 kg de viande à chacun des indigents
de la commune, mesure renouvelée en 1923.
En 1923, il est octroyé
350 F pour la fête (dont 200 F pour le feu d'artifice).
A partir du ler janvier
1924, il est donné 5 F par mois de pain pour les indigents. Les secours
aux femmes en couches sont limités à partir du ler janvier 1924 aux
plus démunies de ressources.
La commune intervint
souvent en faveur de ces cas, de même que l'aide aux familles nombreuses
et prises en charge dans les hôpitaux.
Le 27 novembre 1921,
le Conseil demande des précisions au sujet d'une ligne à haute tension
devant traverser la commune.
A la demande de la commune
de BUXIERES, le conseil donne un avis très favorable à la création d'une
gare à LANNET (25 juin 1922).
Le conseil vote 500
F de primes pour la foire du 11 décembre.
Le groupe scolaire et
la mairie sont assurés pour 120,OOOF
Le règlement du budget
1922 fait apparaître en recettes 38 205 F et en dépenses 34 069 F, excédent
de l'exercice 4 136 F soit avec les autres excédents cumulés 26 654
F.
L'Administration ayant
offert des travailleurs étrangers (notamment Polonais ou Italiens, pays
amis à forte natalité) le conseil rejette cette offre les cheminots
n'arrivant pas à se loger (10/6/23) ; d'ailleurs ces travailleurs ne
pourraient pas avoir d'emploi pendant la morte saison. A cette même
session, il décide l'achat d'un cinéma (utile pour l'enseignement de
l'agriculture) et la réorganisation de la bibliothèque.
Le cinéma coûte 2 000
F + 2 000 F de hausse(25/11/23). Gestion 1923 : excédent de dépenses
de 15 108 F, cette somme est prélevée sur l'excédent de fin 1922 (26
634 F) , l'excédent se trouve ramené à 11 525 F.
Le Conseil refuse la
suppression du PN 240 (Les Partiers) car il passe sur la ligne de ST-ELOY
28 trains par jour.
1924 : Monsieur COTE
Auguste est nommé secrétaire de Mairie.
Après 1924, un peu de
prospérité s'établit à LAPEYROUSE ; dans un vent d'optimisme, on construisait
; le nombre de vélos, de voitures croissait... les moissonneuses‑lieuses
apparurent, puis les presses...
Les chevaux devinrent
plus nombreux ; le travail se faisait un peu plus facilement ; le commerce
prospérait ; l'artisanat aussi (forges, charrons, menuiseries, bourrellerie,
sabotiers, etc...).
Le 15 mars 1925, le
Conseil à l'unanimité demande au P.O. la création d'une gare à Laval.
En effet, le dernier tronçon de l'I.C. 148 devant se terminer en 1925,
une route venant de HYDS arrive au lieu‑dit "Le Chiez"
(il ne reste que 800 m à construire sur LAPEYROUSE) de même BEAUNE se
propose de construire une route jusqu'à Laval ce qui fait que cette
gare serait très utile pour les trois communes surtout pour l'agriculture
(chaux, pommes de terre, grains, paille et foin).
au lieu de faire 6,
8 ou 10 kms, les marchandises seraient presque sur place, d'où un gain
de temps. Une souscription a déjà produit 30.000 F (29.405 F) et la
commune s'engage à faire un effort maximum.
A cette même séance
très importante, il est décidé de pousser activement le projet d'électrification.
Elections du 10 mai
1925 : Messieurs MARTIN et TOURNEAUX sont reconduits dans leurs fonctions
(15 voix chacun) Gestion : résultats définitifs de 1923 : excédent de
recettes 11 525 F (dépenses 41 525 F)
résultats définitifs
de 1924 : excédent de recettes 25 839 F (dépenses 37 800 F).
Pour le recensement
de l'hiver 1925‑26, il est alloué 800 F à Monsieur COTE. 1926
: Monsieur Alphonse BOIROT né le 20 février 1895 est nommé garde‑champêtre
de LAPEYROUSE en remplacement de Monsieur LESCHER.
Le 17 août 1926, le
Conseil décide d'attribuer pour Noël 1kg de viande à chacun des 16 indigents
de la commune.
Un arrêté qui nous fait
sourire aujourd'hui : celui du 21-12-1926 "Dans les agglomérations,
les véhicules à traction mécanique ne devront pas dépasser les vitesses
suivantes : poids lourds (plus de 3 000 kg en charge) 10 km/ H, véhicules
légers (inférieurs à 3 000 kg) 20 km/ H."
Le compte de gestion
de 1926 fait apparaître un total de recettes de 44 458 F et de 49 981
F de dépenses, soit un excédent de dépenses de 5 523 F ce qui ramène
l'excédent général à 20 316 F, cet excédent général sera ramené à 11
927 F après 1927, 11 147 F après 1928 mais 20 067 F après 1929.
Avec l'inflation, le
compte de 1929 présente 161 533 F en recettes et 152 052 en dépenses
d'où une forte hausse des impôts en francs constants.
1927 vit l'avancement
du projet d'électrification de la commune le 19 janvier, le Conseil
(tous membres présents) propose la création d'un syndicat intercommunal
groupant toutes les communes du canton et formule une adhésion de principe
; le 6 novembre de la même année, le conseil adhère pleinement au syndicat
de la région de ST-ELOY-LES-MINES récemment créé, s'engage à une contribution
financière de 314 000 F (l'État subventionnant à 50 %).
Le 31 décembre 1927,
Monsieur Félix AUMAITRE remplace Monsieur COTE comme secrétaire de Mairie.
I1 est réclamé au P.O.
l'installation d'une grue pour la charge et la décharge des marchandises.
L'électrification fut
la grande réalisation de cette période.
Membre créateur du syndicat
de la région de ST-ELOY, à durée illimitée, la commune de LAPEYROUSE
doit faire un emprunt au Crédit Agricole à 5,5%.
Dans les séances du
10 juin 1928 et 4 novembre 1928, le projet est déclaré d'utilité publique
(à l'unanimité) puis la concession donnée à la compagnie Loire et Centre
aussi bien pour l'éclairage privé et public que pour la force motrice.
Le 18 novembre 1928,
il est décidé la vente des biens communaux au cas où l'emprunt ne serait
pas couvert.
Monsieur Félix AUMAITRE
s'engage à fournir un cours post-scolaire agricole
moyennant une indemnité
annuelle de 200 F.
Aux
élections de mai 1929, sont élus :
PHILIPPON Alexis
GRAND Louis
CIVADE Auguste
ROBIN Alphonse
MARTIN Alphonse
LANDRIEVE Louis
LESCHER Marcel
BUVAT Victor
DURANTHON Gilbert
TOURNEAUX Alexis
GAZUT Adolphe
ARDOIN Alexandre
DUJON François
BRUN Baptiste
FAYOL Alphonse
LEPEIX Isidore
soit 16 conseillers.
Monsieur MARTIN est réélu Maire avec 15 voix.
Monsieur TOURNEAUX réélu
adjoint (10 voix) 4 voix à Monsieur BUVAT Victor et 1 à LESCHER Marcel.
Le 3 février 1929, le
conseil refuse la proposition de Monsieur le Maire de MONTLUCON de participer
à l'achat d'une auto-pompe, MONTLUCON se trouvant à plus de 25 kms de
LAPEYROUSE. Séance du 16 juin 1929 : l'emprunt pour l'électricité fait
auprès du Crédit Foncier à des conditions très onéreuses (5,5 %) n'étant
couvert actuellement qu'à 200 000 F (et il faut 380 000 F) le conseil
municipal décide la vente des communaux de La Loge et des Partiers (l'emprunt
devant être clos le 30 juin).
Monsieur LAFANECHERE
Louis Alexandre est nommé garde-champêtre.
Un cantonnier communal
est nommé pour 6 mois (2 novembre au 30 avril) moyennant une somme de
2 400 F pour les 6 mois : Monsieur PEYNET Protais.
La vente des biens communaux
eut lieu le 8 septembre 1929.
Elle procura un excédent
de ressources pour le projet d'électrification et le produit disponible
fut affecté à l'achat de rente française 4 I 1918.
La vente du communal
du Bregeat eut un heureux effet sur la vie locale. I1 s'y construisit
4 maisons (dont les habitants pour 3 maisons venaient de l'extérieur)
et nous eûmes (enfin !) un garage.
Cette troisième décennie
du XXème siècle (la première de l'Après-Guerre) s'achevait sur une prospérité
retrouvée et même développée pour les secteurs économique, agricole
et commercial.
L'École était fort vivante
; le chiffre des élèves oscillait entre 130 et 140. Sans atteindre les
chiffres de 1910 (où l'on dénombrait 172 élèves au ler avril et 103
garçons et 98 filles en saison d'hiver), l'École avait retrouvé une
certaine activité.
Le secteur agricole
était assez prospère (le doryphore n'étant pas encore apparu).
Les foires étaient importantes.
Les machines agricoles
se faisaient nombreuses mais étaient toujours à traction animale.
Beaucoup de jeunes appelés
avaient fait (jusqu'en 1928) l'occupation en Allemagne. Quelques uns
durent faire la guerre du Rif au Maroc, mais en général la PAIX régnait
sur le Monde et LAPEYROUSE en savourait les fruits.
Beaucoup de production,
beaucoup de commerces aussi, surtout agricoles (chaux, charbon, engrais,
céréales) ou alimentaires (2 bouchers, 3 marchands de vin, 4 épiceries,
2 débits de tabac, des restaurateurs, etc...)
Les fêtes du Bourg ou
de la Gare avaient beaucoup d'affluence.
Les autos, les camions
se multipliaient.
En 1929, la décennie
s'acheva avec la prospérité retrouvée et avec un avenir prometteur (la
Fée Électricité était à nos portes...).
LA VIE LOCALE: 1929-1939
Dans
cette décennie, il y eut seulement 129 naissances (de 1919 à 1929, il
y en avait eu 166). Il y eut 201 décès contre 193 de 1919 à 1929.
L'excédent des décès
sur les naissances est donc de 72 de 1929 à 1939 contre
27 de 1919 à 1929.
On construisit beaucoup
pendant cette période : à la Loge, au Bregheat, au Bourg, à la Maison
Rouge.
La prospérité retrouvée
continuait ; la crise mondiale de 1929‑1930 n'atteignit LAPEYROUSE
qu'en 1934-1935. On profitait des bienfaits du progrès : de l'électricité
surtout (installée de 1930 à 1932), du gaz en bouteilles, le charbon
de ST-ELOY s'utilisait de plus en plus ; les machines agricoles se faisaient
plus perfectionnées, plus nombreuses (les presses notamment).
La gare travaillait
à plein régime (charbon, chaux, engrais, produits agricoles, vin, marchandises
de toutes natures) avec un fort trafic de voyageurs. I1 y avait du travail
pour tout le monde : le transbordement des wagons de marchandises sur
les wagons de ligne plus étroite du chemin de fer économique occupait
une forte équipe d'ouvriers. La construction en 1932-1933 d'un nouveau
branchement de voie ferrée (1100 m) pour le kaolin procura du travail
à des dizaines d'ouvriers pendant plus d'un an (il n'y avait pas encore
de bulldozers).
Quelques Lapeyrousiens
profitèrent du chemin de fer pour aller à l'Exposition Coloniale de
1930 où l'on trouvait l'exotisme sous toutes ses formes : depuis les
crocodiles jusqu'aux reconstitutions des temples d'ANGKOR.
Le
1er goudron à Lapeyrouse
Le
goudronnage de la route principale jusqu'à Villonne dura longtemps :
des mois et des mois, voire des années. Le goudron était livré en fûts
de 200 litres, mis à réchauffer dans des chaudières (de grands chaudrons)
au bord de la route, répandu avec des seaux, écarté avec des balais-brosses.
Des ouvriers vivaient avec leur famille dans de petites maisons en bois
traînées par les rouleaux compresseurs. Ils s'appelaient Mr NAVARRE,
le "Tahar" etc...
Réalisé par ce procédé
archaïque, bien que les couches de fermeture furent faites avec des
goudronneuses en camions citernes, le goudron ne résista pas très longtemps
(avec le défaut d'entretien inhérent à la guerre, la route était en
très mauvais état en 1945).
Beaucoup d'activités
dans la gare où les locomotives à vapeur ravitaillaient en eau, en charbon
aussi, où elles pouvaient tourner grâce au pont‑tournant, se garer
dans le dépôt, où manoeuvres et aiguillages exigeaient pas mal de main-d'oeuvre.
Les hôtels-restaurants
travaillaient beaucoup. Dans la grande salle d'attente, on trouvait
au kiosque, journaux, revues, tabacs, à l'heure des trains de voyageurs.
Lorsqu' en 1937, le P.0-MIDI fut nationalisé en S.N.C.F., l'emploi atteint
son maximum (avec plus de 50 employés ; les 11 maisonnettes situées
sur la commune étaient toutes occupées). L'apport de cette population
de cheminots compensait le déficit de la démographie. Certains venus
d'ailleurs se fixèrent au pays. Certes, la grande fête annuelle de la
Gare allait en déclinant ; en 1935, il fallut tout le dynamisme du maçon
italien Lino pour qu'elle retrouve son éclat d'antan.
La gare connut donc
une activité et une prospérité soutenues durant cette quatrième décennie
du XXè siècle.
L'agriculture
Il
n'en fut pas de même pour l'Agriculture : l'apparition du Doryphore
(vers 1931), ce coléoptère venu d'Amérique dans nos ports allait ruiner
la production de nos "Mijeux de Treuffes" tant jalousés par
leurs voisins. Le mal allait rapidement prendre de l'ampleur et les
plantations diminuèrent en surfaces (pourtant ce fut à LAPEYROUSE que
les élèves de l'École Communale apportèrent en premier lieu ces insectes
nouvelle parue au "Moniteur du Puy-De-Dôme".)
Puis vint la chute des
cours du blé. L'ordre du jour du gouvernement Laval était la lutte contre
la cherté de la vie, la baisse des produits alimentaires. Après la reconnaissance
de l'U.R.S.S., l'envoi d'un ambassadeur à MOSCOU, la signature d'un
traité de commerce avec importation de blé russe, cet apport de blé
coïncidant avec un excédent de récolte en France, ce fut l'effondrement
des cours amplifié par l'agiotage et la spéculation. Le blé qui s'était
vendu au début 80 F le quintal chuta rapidement à 56 F voire 55 F. En
1934 et 1935, ce fut la ruine pour de nombreux exploitants de l'époque
contraints à vendre tout ou partie de leurs biens. Les plus touchés
étaient les vieux qui étaient inaptes au travail et sans retraite et
les familles nombreuses sans allocations familiales. Au mois d'octobre,
les cours remontèrent à 105 F mais les producteurs avaient vendu leur
blé et la catastrophe était consommée. En 1936, fut créé l'Office du
Blé et en 1937, le blé fut payé 200 F le quintal ce qui amena une amélioration
du sort de nos paysans, amélioration cependant atténuée du fait d'une
moindre récolte et la création en 1937 de la taxe d'armement qui frappa
tous les produits alimentaires, manufacturés, industriels. Pour compléter
la liste des calamités du monde rural, il y eut la sécheresse en 1936
et surtout en 1938 et l'apparition de la fièvre aphteuse "la Cocotte"
durant tout un été.
Les hôtels‑restaurants
travaillaient beaucoup. Dans la grande salle d'attente, on trouvait
au kiosque, journaux, revues, tabacs, à l'heure des trains de voyageurs.
Lorsqu' en 1937, le P.0‑MIDI fut nationalisé en S.N.C.F., l'emploi
atteint son maximum (avec plus de 50 employés ; les 11 maisonnettes
situées sur la commune étaient toutes occupées). L'apport de cette population
de cheminots compensait le déficit de la démographie. Certains venus
d'ailleurs se fixèrent au pays. Certes, la grande fête annuelle de la
Gare allait en déclinant ; en 1935, il fallut tout le dynamisme du maçon
italien Lino pour qu'elle retrouve son éclat d'antan.
La gare connut donc
une activité et une prospérité soutenues durant cette quatrième décennie
du XXè siècle.
L'activité commerciale
L'activité commerciale
fut assez soutenue pendant cette décennie (malgré le manque d'argent).
En 1928, une boucherie avait ouvert à La Loge, s'ajoutant à celle du
Bourg, puis une charcuterie en 1935-36. Les épiceries étaient nombreuses
; les commerces alimentaires ou agricoles étaient actifs. Un médecin
: le docteur Pierre GIBERT s'installa à Bruges. L'artisanat aussi progressait
: une scierie fixe à La Loge remplaça les bancs de scie mobiles et saisonniers
qui s'installaient sur des terrains communaux (au Bregheat et aux Monteix
notamment). I1 y eut deux salons de coiffure au Bourg, plusieurs menuiseries,
plusieurs couturières, plusieurs entreprises de maçonnerie, des sabotiers,
des réparateurs de chaussures. Il y avait plusieurs forges et les maréchaux
ferrants travaillaient énormément (vu le grand nombre de chevaux de
trait, de boeufs ou vaches de travail, il n'y avait pas encore de tracteurs).
La charronnerie était active, la charpenterie aussi.
La
période de 1929 à 1933 s'écoula sans trop d'aléas. Mais à partir de
1934, surtout 1935, l'ambiance glissa vers la morosité, puis vers l'incertitude.
A la crise économique s'ajoutaient des évènements de plus en plus graves.
Succédant à l'affaire STAVISKY, la tentative de coup d'état du 6 février
1934 échauffa les esprits. Cela s'amplifia en 1935 avec l'occupation
de la rive gauche du Rhin, la guerre italo-éthiopienne, la rupture d'après
Stresa. Dès lors, les évènements tant nationaux qu'internationaux allaient
prendre le pas sur toutes les préoccupations quotidiennes. Déjà en 1935,
le Curé BACCONET évoquait dans ses sermons notre "dangereux voisin
de l'Est".
L'année 1936 fut très
agitée. En Espagne, en février, le frente popular avait triomphé ; en
France ce fut de même ; dans le Puy-De-Dôme, il y eut 8 députés élus
toue socialistes sauf 1 radical-socialiste Chassaing et l radical de
droite (LACHAL) A AMBERT. A RIOM, il y avait 5 candidats : A VARENNE,
DIOT (P.C.) Alfred RATELADE (paysan) GALLAND droite et un fantaisiste
: CHARDONNET. A LAPEYROUSE, les résultats se firent dans l'ordre ci‑dessous.
Alfred RATELADE élu avec 84 voix d'avance fut invalidé par la Chambre
des Députés.
Une deuxième élection
eut lieu : A VARENNE ne s'étant pas représenté, ce fut le S.F.I.O. COULAUDON
qui fut élu. Ce climat passionné, exacerbé par la guerre d'Espagne (18
juillet 1936) les grandes grèves avec occupation d'usines dura plus
de 6 mois. Le dimanche soir, on voyait passer des "gars de la ville"
en voiture, brandissant drapeaux rouges et chantant l'Internationale.
Le 28 février 1937 eut lieu à La Loge la fête du Front Populaire. Prosper
MOCQUET, député de PARIS, remplaçant Jacques DUCLOS vint faire un discours
; il avait amené son fils Guy (12 ans). Ce dernier devait être 4 ans
plus tard le plus jeune des 27 otages martyrs fusillés à CHATEAUBRIANT.
L'été 1937 fut moins agité ; il y avait à PARIS l'Exposition Universelle
qui fut un succès et que visitèrent beaucoup de Lapeyrousiens. Cependant
on croisait dans les trains les réfugiés espagnols et l'affaire du C.S.A.R.
dont les deux pôles étaient CLERMONT et PARIS échauffait les esprits.
1938 : dès le 15 mars, l'ANSCHLUSS ne manquait pas d'inquiéter de même
que la prolongation du service militaire ; le 28 septembre 1938, MUNICH
fut interprété comme une capitulation de la France et de l'Angleterre.
L'Agriculture subit les effets néfastes d'une forte sécheresse. Le démembrement
de la Tchécoslovaquie le 15 mars 1939 occasionna le rappel de certains
réservistes et le maintien des libérables.(on était dans la période
des classes creuses coïncidant avec la mobilisation des pères en 1914-1918).
Et si la récolte de blé fut bonne, ce fut en pleine période de battages
que durent partir nos soldats (le 23 août pacte germano-soviétique ;
le ler septembre, invasion de la Pologne ; le 2, mobilisation générale
et le dimanche 3 vers midi, état de guerre de l'Angleterre et de la
France avec l'Allemagne. Les facteurs à l'époque travaillaient le dimanche
matin. On s'arrachait les dernières nouvelles. Le Moniteur commençait
son éditorial par ces mots laconiques : "La Guerre est là..."
Tous les plus jeunes partaient les premiers jours, souvent le ler et
le 2ème jour. Pas de cris comme en 1914 ; seul un silence pesant (le
glas ne tinta que 1/4 d'heure). La catastrophe de 1914-1918 était trop
présente dans tous les esprits pour qu'on se livrât à de quelconques
manifestations ou débordements. En même temps qu'on "livrait"
les hommes valides de la commune, on la vidait aussi de ses animaux
de travail. Dès le premier jour, les chevaux furent conduits à MONTAIGUT
devant la Commission de Réquisition, ils furent payés de 6 000 à 8 500
F. Par suite d'un hiver long et froid, du manque d'organisation, de
la pagaille, plus de 50 % de ces braves animaux étaient morts au printemps.
Les hommes rejoignirent
en maugréant. Les wagons de marchandises paraissaient vides (un train
de 1000 à 1500 hommes faisait si peu de bruit qu'on aurait cru qu'il
n'y avait personne). Après quelques opérations limitées en Sarre où
les Allemands avaient tout miné et après la chute de la Pologne, ce
fut la "drôle de guerre", le quasi-arrêt des opérations. Nos
soldats purent venir en permissions de détente avant la fin de Vannée.
Ainsi 1939 s'achevait donc en tragédie : les hommes absents de leurs
foyers
tous les bons chevaux
réquisitionnés, un hiver dur à nos portes, un avenir plus que lourd
de menaces...